Le 11 avril dernier a été signée la Charte interprofessionnelle sur les modifications de prix du livre et leur marquage, en présidence de la ministre de la Culture, Madame Rachida Dati.

L’ALIRE est signataire de cette charte, en compagnie du SLF, du SDLC, du groupe FNAC-DARTY, du Groupement d’Achat des centres E.Leclerc, des librairies Gibert, de Dilicom et du SNE.

Douze engagements collectifs sur les modifications de prix et leur marquage sur les livres

Après une longue période de stabilité des prix du livre, les augmentations de coûts ont conduit depuis 2022 à un mouvement inédit de modifications de prix, que ce soit à l’échelle d’un titre ou de collections entières. Or, si la décision de modifier le prix de vente au public d’un livre relève de l’éditeur, elle se répercute nécessairement sur tous les acteurs de la chaîne du livre, dont elle affecte la rémunération et qui doivent en assurer la mise en œuvre.

C’est parce qu’ils sont conscients de cet enjeu partagé que les signataires de la présente charte prennent les engagements suivants :

  • Engagement n° 1 : Privilégier les réimpressions de titres pour procéder aux changements de prix. Le contexte particulier connu depuis 2022 a pu conduire, dans une certaine urgence, à des décisions plus nombreuses que par le passé de changements de prix du livre. Cette expérience montre les enjeux pratiques délicats que pose le ré étiquetage des stocks de livres, que ce soit en entrepôt ou dans les librairies. Dans ces conditions, la meilleure manière de résoudre ces difficultés apparaît de faire coïncider changement de prix et réimpression d’un nouveau tirage. Le nouveau prix est ainsi marqué sur les ouvrages dès leur mise en circulation. Cette pratique éprouvée devrait d’ailleurs être facilitée par la tendance au raccourcissement des tirages.
  • Engagement n° 2 : À défaut de réimpression permettant un marquage du nouveau prix, procéder au niveau de la distribution au ré-étiquetage des titres à expédier aux détaillants. Pour les cas où les modifications de prix concernent des ouvrages existants et déjà imprimés, le principe doit être que les éditeurs assurent le ré étiquetage des ouvrages avant leur livraison aux détaillants, sauf circonstances particulières dont il leur appartient de pouvoir justifier. Ce ré étiquetage, qui constitue un engagement dont le coût ne doit pas être sous-estimé, peut être effectué le plus souvent par les distributeurs pour les exemplaires qui se trouvent dans leurs entrepôts. Il nécessite des chaînes de traitement automatisées ou des processus de ré-étiquetage manuels avec des capacités de traitement suffisantes pour prendre en charge les commandes de réassort.
  • Engagement n° 3 : Lorsque des opérations de ré étiquetage restent imposées aux détaillants, tout faire pour en limiter l’impact sur leur activité. Le mouvement de changements de prix en 2022 et 2023 a trop souvent fait peser sur les détaillants une charge de ré étiquetage importante, tant pour les livres qu’ils détenaient en stock que, dans une mesure qui n’aurait dû être que résiduelle, pour des livres commandés en réassort et non ré étiquetés avant leur livraison. Cette situation n’est bonne ni pour l’information du public sur les prix ni pour le fonctionnement des librairies. Les engagements de la présente charte visent à remédier à ces difficultés.
  • Engagement n° 4 : Veiller à pleinement intégrer les préoccupations de développement durable dans le processus d’étiquetage. Lorsque des étiquettes doivent être apposées, à quelque stade que ce soit, il faut veiller à ce qu’elles ne s’opposent pas à un éventuel retour de l’ouvrage vers le distributeur. Leurs mentions ou leur mode d’apposition ne doivent pas conduire à la mise au pilon de l’ouvrage. Parmi les bonnes pratiques figurent les étiquettes neutres qui ne portent pas le nom du détaillant et celles qui sont susceptibles de s’ôter aisément. S’agissant des étiquettes pratiquées par certains détaillants qui comportent des mentions autres que le prix, il est en principe souhaitable qu’elles puissent être retirées avant tout retour. Enfin, il est souhaitable, pour une parfaite clarté aux yeux de tous, que les étiquettes qui indiquent un prix le qualifient expressément de « prix éditeur ».
  • Engagement n° 5 : Pour un même titre, en principe pas de modification de prix dans les six mois qui suivent sa parution et pas plus d’une modification par an. Eu égard aux enjeux opérationnels qu’il soulève pour tous les acteurs de la filière comme pour l’information des lecteurs, le changement de prix doit être ciblé et soupesé, ce qui justifie d’identifier des bonnes pratiques dans ce domaine. Lorsqu’un titre est commercialisé, il n’y a pas de raison a priori pour que son prix de vente ne puisse pas être fixé de manière stable pour une durée d’au moins six mois. De la même façon, lorsqu’un éditeur procède à un changement de prix, il doit être en mesure d’en apprécier les paramètres de manière à ne pas devoir procéder à un autre changement avant un an.
  • Engagement n° 6 : Éviter les modifications de prix pendant les périodes de l’année les plus chargées pour les détaillants, entre début septembre et fin décembre. Les signataires de la présente charte sont conscients que ces périodes de l’année, où se combinent arrivées importantes de nouveaux titres en librairies et pics d’activité saisonnière, sont particulièrement délicates à gérer pour les détaillants. Elles ne leur permettent pas de traiter aisément les changements de prix sur les titres qu’ils possèdent en stock ni de surveiller sur ce point les titres qui leur sont livrés en réassort. C’est pourquoi les modifications de prix sur les titres existants et non réimprimés devraient être concentrées sur le reste de l’année.
  • Engagement n° 7 : Privilégier les changements de prix le 1er jour du mois. Pour permettre aux détaillants de s’organiser, il apparait préférable que les modifications de prix soient concentrées à des dates fixes, ce qui correspond d’ailleurs déjà à la pratique majoritaire. En la matière, le choix du premier jour du mois apparaît le plus pertinent.
  • Engagement n° 8 : Calibrer pour chaque titre les modifications de prix de manière à tenir compte du coût induit pour tous les acteurs de la chaîne du livre. Lorsque le prix d’un titre est modifié en dehors d’une réimpression, cela implique un ré étiquetage qui pèse en principe sur l’éditeur (et donc un coût pour lui). Dans ce cas, l’opération entraîne également un coût pour le détaillant, au moins pour le ré étiquetage des exemplaires qu’il détient déjà en stock. Une modification de prix minime qui n’intégrerait pas ces paramètres ne serait donc pas justifiée.
  • Engagement n° 9 : Mobiliser le Ficher Exhaustif du Livre (FEL) pour communiquer les annonces de modification de prix aux détaillants avec un délai de prévenance minimal d’un mois. La délivrance d’une information préalable au détaillant en cas de changement de prix est une exigence posée par la circulaire du 30 décembre 1981 comme par le protocole d’accord sur les usages commerciaux de l’édition avec la librairie du 26 juin 2008. Les signataires de la présente charte s’accordent à préconiser le respect d’un délai minimal d’un mois entre l’annonce d’un nouveau prix et son entrée en vigueur pour les détaillants. A cet effet, ils soutiennent un recours accru à l’outil commun utilisé par les professions que constitue le Fichier Exhaustif du Livre, géré par Dilicom, même si la présence de l’information dans le fichier ne suffit pas en soi à donner connaissance de l’information au libraire. Plus particulièrement, il convient pour l’éditeur de remplir systématiquement à l’avance le champ « prix futurs » que comporte le FEL. Dilicom pourra sensibiliser les distributeurs et diffuseurs sur ce point, le cas échéant dans son prochain plan qualité.
  • Engagement n° 10 : Systématiser, dans les logiciels de gestion des détaillants, le recours aux fonctionnalités faisant apparaître les changements de prix récents et futurs à tous les stades, notamment recherche dans le catalogue, commande des clients et réception des titres. Les logiciels de gestion permettent en pratique généralement aux libraires d’éditer une liste des changements annoncés dans le FEL pour les titres qu’ils détiennent en stock, ce qui est la manière la plus efficace de leur en donner connaissance. Une fois l’usage du champ « prix futurs » avec un délai d’un mois généralisé, des progrès seront encore possibles dans ces logiciels et leur usage, comme donner une visibilité sur un mois plutôt que sur quelques jours et développer des dispositifs d’alerte à tous les stades en cas de changement de prix concernant les ouvrages en stock. Dilicom et l’ALIRE pourront sensibiliser les entreprises de services numériques qui proposent ces logiciels pour qu’ils permettent de tirer pleinement parti de l’information préalable entrée dans le FEL.
  • Engagement n° 11 : Informer les clients sur le risque de discordances exceptionnelles entre les prix marqués et les prix demandés en caisse par des affichettes claires et visibles. Même si le respect des engagements pris dans la présente charte doit conduire à limiter le risque, pour un lecteur, de se voir demander en caisse un prix différent de celui qui figure sur l’ouvrage trouvé en rayons, ce risque peut subsister de manière résiduelle pour certains titres, ce qui pose un problème de compréhension évident pour les clients des librairies. Afin d’y remédier, les librairies pourraient afficher de manière visible, notamment près des caisses, le message suivant :
Information relative aux prix des livres  Les augmentations de coûts subis par les éditeurs, qui fixent le prix des livres en application de la loi du 10 août 1981, ont pu les conduire à revoir le prix de certains livres. Votre libraire veille au bon étiquetage des ouvrages, mais certains prix marqués sur les livres peuvent de manière transitoire ne plus correspondre au tarif qui vous sera demandé en caisse. Nous restons à votre disposition pour répondre à vos questions et vous remercions de votre compréhension.
  • Engagement n° 12 : Poursuivre ensemble le travail afin d’améliorer l’information des lecteurs sur le prix dans les cas où il est marqué sous la forme d’un code. Dans le cadre très dérogatoire de la tolérance envisagée par la circulaire du 30 décembre 1981, certains éditeurs ont choisi pour certaines collections, notamment de poche ou de bandes dessinées, de remplacer le marquage du prix par l’indication d’un code prix. Des grilles de prix sont en principe mises à la disposition des clients en librairie pour les informer, collection par collection, de la correspondance entre code prix et prix en euros. Si cette pratique offre une certaine souplesse, puisqu’elle dispense d’actualiser le prix marqué sur les exemplaires en cas de modification, elle n’en reste pas moins dans son principe en décalage avec l’obligation générale de marquage du prix, qui est la meilleure garantie de clarté pour les lecteurs et de confiance de ceux-ci dans l’application du prix unique. Sur le plan pratique, elle soulève également des enjeux d’information pour les clients des librairies, alors que se sont multipliés les éditeurs et les collections concernés. Les signataires de la présente charte conviennent, sur ce sujet qui dépasse la question des modifications de prix, d’engager une réflexion partagée pour améliorer l’information des lecteurs lorsqu’il est recouru à de tels codes prix sur les livres. Il s’agira notamment de rappeler que le marquage du prix sur chaque exemplaire reste en principe la meilleure manière d’assurer le respect du prix unique du livre, de dresser un état des lieux des pratiques actuelles en matière de recours aux codes prix, y compris les caractéristiques des collections concernées et l’évolution des prix en cause et de faire le point sur les modalités d’information que cela implique pour les clients en librairies. Il pourra également être déterminé si une certaine harmonisation du format de ces grilles est possible, et plus largement quelles sont les possibilités de mutualisation, de mise à jour et de modernisation de l’information, tant pour les détaillants que pour le public en librairie.

Les douze engagements collectifs souscrits par les organisations signataires de la présente charte témoignent de leur conscience partagée que les modifications de prix, si elles relèvent d’une décision confiée par la loi à l’éditeur, n’en doivent pas moins être mises en œuvre d’une manière qui tienne compte des enjeux de toute la chaîne du livre. Par ce dialogue, qu’elles entendent inscrire dans la durée, avec le médiateur du livre, elles témoignent ainsi de leur attachement très concret au principe du prix unique, au service du livre et des lecteurs.

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